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Le pavillon du cinéma
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12 décembre 2006

Babel, d'Alejandro Gonzalez Inarritu

affiche

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Un petit compte-rendu pour ce qui constitue une de mes déceptions en cette période faste au niveau ciné. Babel est le dernier film de Alejandro Gonzalez Inarritu (Amours Chiennes ou encore 21 grammes). Il raconte quatre histoires en parallèles, situées sur trois continents, et mettant en scène des personnages de quatre nationalités différentes. Toutes ces histoires sont bien sûr liées entre elles dans une sorte de composition chorale métaphore de l’effet papillon. L’on passe d’un histoire à l’autre par succession de petites saynètes et l’on comprend petit à petit les liens qui unissent ces différents récits, bien que cela ne soit pas vraiment l’enjeu principal de l’intrigue. Hormis l’une des quatre dont le lien est très ténu, anecdotique et décisif à la fois, qui paraît assez détachée de l’ensemble, les trois autres sont unies de manière quasiment affichées dès le départ. L’ambition du film est alors double : d’une part montrer les difficultés de communication entre cultures, et rendre ainsi la perception du monde fragmentée qui nous échappe si souvent (d’où le titre) ; et d’autre part aller contre cet étoilement de surface et faire jaillir l’essence commune de l’humain présent dans chaque personnage de l’histoire. Et cela passe par la mise en scène de la détresse pour Inarritu, premier dénominateur commun à ses yeux apparemment de l’humanité. Et c’est justement là que doublement le réalisateur échoue pour moi malgré un film maîtrisé, formellement très réussi, toujours très bien interprété, parfois même beau. Mais jamais inspiré, ce qui demeure nécessaire dans une telle entreprise.

cate

Où l’on apprend que les mariés s’envolent, que la J-Pop c’est fait pour les sourds, que le cours de la chèvre vaut presque celui du fusil, et que Brad Pitt pourra toujours se reconvertir en pissotière si le besoin s’en fait sentir.

Le premier récit est celui d’enfants américains gardés par leur nourrice mexicaine. Les parents devaient rentrer de voyage, mais ils ont un imprévu. Problème, la nourrice marie son fils de l’autre côté de la frontière. Elle décide donc d’embarquer les enfants pour la fête, emmenée par son neveu.

Le second récit est celui d’une famille pauvre de bergers marocains. Isolés sur des collines rocailleuses, les deux fils de la famille emmènent les chèvres paître. Les occupations sont minces, comprises entre regarder la sœur complice en train de se doucher et jeter des cailloux. Mais le père achète à un voisin un fusil pour éloigner les chacals qui déciment son troupeau.

Le troisième récit est celui d’un couple américain en crise et en vacances au Maroc. Une balle perdue le mettra définitivement en péril.

Le dernier récit se passe au Japon et suit une adolescente sourde et muette à la dérive mise au supplice par des désirs qu’elle ne peut exprimer.

La qualité des différents récits m’a semblé très inégale. Quatre films n’en font pas un, et la somme des parties n’est pas le tout. Mais surtout c’est le tour pris par chacun qui ma désolé. Autant je les ai trouvé tous les quatre justes dans la première moitié du film, autant ils me semblent dérapés « collectivement » dans une dérive de quête effrénée du pathos histoire de s’assurer de l’empathie du spectateur. Ca m’a personnellement glacé, énervé, et je suis resté finalement à distance. Le couple américain est très bien (Cate Blanchett géniale !), et leur relation dans la souffrance est très joliment travaillée. Mais les à-côté, le rapport aux autorités, aux autres touristes est lourde. Le film devient moralisateur, didactique, donneur de leçon. Cela est encore plus frappant avec les trames comprenant les enfants. Que ce soit au Mexique ou au Maroc, le suspens qui entoure leur sort est outrancier, et confine pour moi à l’invraisemblable, et même au ridicule. Seul surnage le film japonais, de bout en bout superbe, fin et subtil par comparaison aux autres. Inarritu a dû apparemment adapter son discours à l’esprit local, et heureusement. Son jeu sur la détresse humaine trouve là seulement à mes yeux une expression juste et réussie. Mais surtout, pour un film s’appelant Babel, les problèmes de communications restent finalement bien superficiels. La langue n’est jamais un obstacle (et on préfère de toute façon que ce soit les japonais qui soient muets ; j’aurais trouvé ça plus drôle et intéressant de donner ce rôle à des anglophones…), et c’est seulement la « culture » entendue dans un sens très vague et large, qui sépare. Mais le flou autour de ces « cultures » conduit finalement à une sorte de caricature qui tue pour moi l’intention du film. Comme s’il avait manqué son propos. Un comble quand on s’intitule « Babel »…

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rinko

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